Premier film, premier coup de maitre : avec Douze hommes en colere, sorti en 1957, le petit realisateur Sidney Lumet innovait doublement.
Par une prouesse technique d’abord : exemple paroxystique du huis clos, le film confronte un jury de douze hommes dans un espace unique, ainsi, presque a autre vrai.
Mais aussi avec son propos, vibrant plaidoyer pour une justice plus egalitaire, toujours d’une effrayante actualite cinquante ans apres la sortie du film.
Le film commence aussi qu’un proces touche a sa fin. Un jury de douze hommes ecoute attentivement le discours las, cent fois repete du juge. Ils vont devoir statuer concernant le sort de l’accuse. Les regles leur paraissent bien expliques : chacun va devoir donner son avis, ainsi, le jugement doit etre unanime Afin de etre valide. Si l’accuse est declare coupable avec les douze hommes, il ira droit a J’ai chaise electrique. Alors que le jury se retire, la camera se deplace lentement, montrant la figure de l’accuse de profil, dans l’ombre, puis de face, en gros plan. C’est un petit garcon basane, peut-etre d’origine latino-americaine. La peur se lit dans ses yeux. Ce est la seule image que le spectateur aura de lui. Le film suit ensuite le jury, qui s’installe dans une petite piece exigue. Un premier vote est enfile en place. Tous votent coupable, sauf votre, le jure numero 6 (Henry Fonda). Il declare avoir 1 “doute legitime” sur la culpabilite de l’accuse. Les debats vont commencer.
Douze hommes en colere reste un modele presque universitaire de mise en scene.
Il s’agit d’un huis clos quasi parfait, puisque seules nos scenes d’ouverture et de cloture du film, longues d’a peine 5 minutes, se deroulent a l’exterieur du decor principal, la piece de deliberation d’un jury dans un tribunal. Pour reussir votre tour de force, Sidney Lumet necessitait des fondements scenaristiques vraiment bonnes. Cela trouva en Reginald Rose, le scenariste, un adjuvant de choix, capable de conjuguer l’atmosphere de reclusion oppressante induite avec le huis clos, avec 1 suspense haletant, ou notre vie d’un adolescent tient en ces 2 mots repetes douze fois : « not guilty » (non coupable).
La soiree de Lumet se nourrit de l’importance des details. Puisque le vote n’est pas unanime, des jures vont devoir retracer bien le proces, ainsi, tenter de se persuader mutuellement qu’il va falloir (ou non) envoyer l’accuse a Notre chaise electrique. Cela ne s’agit naturellement aucune refaire le proces a la maniere d’un detective ou d’un policier. Di?s que le jure numero 6 declare l’accuse non coupable, votre n’est gui?re qu’il est convaincu de le innocence. Comme il l’explique lui-meme, il lui parait d’abord juste d’accorder quelques minutes de reflexion qui plus est a l’existence de cet adolescent, ne serait-ce que par respect pour sa jeunesse. D’autant que votre jure n’est pas totalement convaincu non plus de sa culpabilite. Chacune des pieces de l’accusation ? un couteau, des temoignages, le plan d’un appartement, etc ? va donc etre passe au crible via le jury, au desordre des souvenirs de chacun.
Pour reussir votre huis clos, il va falloir etre un maitre absolu du suspense. Douze hommes en colere en reste empli : quand Henry Fonda se leve, seul contre l’ensemble de, ainsi, subit la colere des autres jures, c’est complexe d’imaginer De quelle fai§on il arrivera tout le monde les persuader. Sera-t-il, enfin, celui qui devra ceder ? Neanmoins, a mesure que l’argumentation du jure avance, d’autres vont ceder, petit a petit, convaincus non pas de l’innocence de l’adolescent ? votre point est tres important ?, mais qu’il existe effectivement un « doute legitime », des incoherences dans l’accusation, qui interdisent l’envoi d’un jeune garcon a J’ai mort. Le suspense se tarissant au fur et a mesure des ralliements des jures (un happy-end semble inevitable), Sidney Lumet en ravive le sentiment haletant et claustrophobique avec un procede vraiment habile : alors que la soiree, au depart, multiplie les plans d’ensemble, la camera se rapproche inevitablement des visages necessaires des jures, pour finir via des gros plans oppressants, en contre-plongee, a mesure que la tension grandit.
Cette tension est accentuee via deux aspects : d’abord, la chaleur du « jour le plus chaud de l’annee ». Tous les jures transpirent, se plaignent, veulent en finir. La plupart votent coupable pour i?tre capable de s’en aller le plus vite possible. Notre ventilateur qui ne parai®t nullement fonctionner apparait souvent en arriere-plan, comme le rappel mortifiant qu’un homme pourrait mourir simplement parce qu’a la date de le proces, il faisait trop chaud. J’ai chaleur accentue l’enervement des jures, qui seront confrontes a l’impossible controle https://datingmentor.org/fr/outpersonals-review/ de leurs pulsions emotives, induites par l’absence de bien-etre. C’est votre deuxieme aspect qu’interroge brillamment Lumet. Chacun des jures est designe via un numero : on ne connait le nom d’aucun d’entre eux. Tous ont pourtant une individualite, discernee par leurs professions reciproques, mais aussi avec leurs discours. Que l’un d’entre eux soit profondement raciste, un autre d’origine immigree, ou qu’un nouvelle encore n’ait nullement decouvert son jeune gamin depuis deux annees prend petit a petit de son importance. Par l’intermediaire d’Henry Fonda, le jure refractaire, Sidney Lumet pose cette question quasiment insoluble : est-il possible de rendre une decision veritablement juste, c’est-a-dire totalement exterieure a des considerations personnelles ? C’est tout le sens de ces apartes entre des jures, qui, si des debats s’eternisent ou semblent bloques, lient connaissance, parlent de leur vie, de leur parcours ou de leur education. Sidney Lumet s’applique a decrire l’individualite necessaires des personnages, en les placant forcement adroitement au cadre. Chaque plan n’inclut Dans les faits que le ou des jures qui vont Realiser avancer le recit, soit par leurs declarations, soit par leurs attitudes ou encore par un visage muet et consterne qui marquent un revirement ou 1 doute dans l’esprit du personnage.
Chacun des douze jures est representatif d’une certaine Amerique. Aucune femmes, encore moins de minorites (et pourtant, ces Blancs vont statuer via le sort d’un homme de couleur, detail egalement important), mais des classes sociales et des origines differentes. Sidney Lumet rend d’abord hommage a Notre justice de son pays, qui n’autorise l’envoi d’un homme a la fond que s’il reste unanimement declare coupable. Notre systeme du « doute legitime » et de la necessite pour l’accusation de prouver la culpabilite de l’accuse (a l’inverse d’autres systemes ou c’est a Notre defense de prouver l’innocence), n’est nullement remis en cause. Ce que Sidney Lumet attaque en profondeur n’a jamais grand-chose a voir avec les lois, mais avec ce qui les entourent : tel, pourquoi pas, l’incompetence d’un avocat commis d’office, non convaincu de l’innocence d’un “client” trop pauvre pour remunerer un meilleur defenseur.